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Cher Père Angelo,

je suis un jeune chrétien pratiquant et je vous écris pour vous demander quelques éclaircissements en matière de foi qui, bien qu’ils semblent évidents pour plein de croyants, ce n’est pas mon cas.

En bref afin d’être plus clair :

1) Quelle est la raison pour laquelle le Christ est venu sur terre ?

2) Quel est le sens de l’affirmation selon laquelle nous aussi, par nos actes quotidiens, nos activités professionnelles, nos études, participons à l’activité de la Rédemption ?

Je vous remercie!


Réponse du prêtre

Mon cher,

1. Dans une page admirable, le Catéchisme de l’Eglise Catholique (CEC) résume les raisons de l’incarnation de Dieu.

L’enchaînement de ces dernières laisse aussi apercevoir une hiérarchie entre ces motifs.

2. Au-delà des écoles théologiques, le Catéchisme reste fidèle à la dictée de l’Ecriture Sainte.

C’est par son biais que le Seigneur révèle les motifs de son incarnation.

3. La page que je viens de mentionner porte ce titre: Parce que le Verbe s’est fait chair. Et tout de suite on rappelle que nous sommes la raison de l’incarnation, notre salut: «Par le Credo de Nicée-Constantinople nous confessons du Verbe que “Pour nous les hommes, et pour notre salut, il descendit du ciel ; par l’Esprit Saint, il a pris chair de la Vierge Marie, et s’est fait homme”» (CEC). Il s’agit, donc, d’un grand acte d’amour.

4. Et voici la première motivation : «Le Verbe s’est fait chair pour nous sauver en nous réconciliant avec Dieu : c’est Dieu, qu’il nous a aimés et a envoyé son Fils comme victime expiatoire pour nos péchés» (1 Jean 4, 10).

“Le Père, qui a envoyé son Fils pour être le Sauveur du monde” (1 Jean 4,14).

Jésus a paru pour ôter les péchés» (1 Jean 3,5). (CEC 457).

Voilà pourquoi saint Thomas dit : « Il y a des opinions opposées à ce sujet.

Certains disent que le Fils de Dieu se serait fait homme même si l’humanité n’avait pas péché.

D’autres, en revanche, prétendent le contraire.

Il faudrait accorder la préférence à cette dernière. 

En effet, les choses qui dépendent de la seule volonté de Dieu, au-dessus de tout ce qui est dû aux créatures, ne peuvent être connues que par la Sainte Écriture, dans laquelle la volonté divine est manifestée. 

Voilà pourquoi, puisque dans l’Écriture Sainte la raison de l’incarnation est toujours déduite du péché du premier homme, il vaut mieux dire que l’œuvre de l’incarnation aurait été disposée par Dieu en tant que remède au péché, de sorte que, si le péché n’existait pas, il n’y aurait pas eu d’incarnation.

La puissance de Dieu n’est cependant pas limitée par ces termes : Dieu aurait pu s’incarner même s’il n’y avait pas eu de péché» (Somme théologique, III, 1, 1).

5. Il cite saint Agustin à titre de témoignage qui, en expliquant les paroles de l’Évangile: “le fils de l’homme est venu chercher et sauver ce qui est perdu” déclare: “Si l’homme n’avait pas péché, le fils de l’homme ne serait pas venu”. En plus, commentant les paroles de saint Paul, “le Christ est venu dans le monde pour sauver les pécheurs”, la Glose ajoute: “le Christ Seigneur n’a eu d’autre motif de venir parmi nous que de sauver les pécheurs. Enlevez les maladies, les blessures, il n’y a plus besoin de la médecine”. (Ib, Sed contra).

6. Le CEC cite la motivation de saint Grégoire de Nysse: “Notre nature malade, demandait à être guérie; déchue, à être relevée; morte , à être ressuscitée.

Nous avions perdu la possession du bien, il fallait nous le rendre. 

Plongés dans les ténèbres, nous avions besoin qu’on nous apporte la lumière ; perdus, nous attendions un sauveur ; captifs, un sauveteur ; esclaves, un libérateur.

Toutes ces raisons étaient-elles sans importance? N’ont-elles pas tellement ému pour Dieu, qu’il est descendu dans notre nature humaine pour la visiter, puisque l’humanité était dans une condition si misérable et si malheureuse?” (Oratio Cathetica, 15) (CEC 457).

La première motivation de l’Incarnation est pourtant due au péché, ayant empêché l’homme de communier avec Dieu et de perdre possession de tous ses biens. Alors que c’est précisément pour cela que Dieu l’avait créé.

7. La deuxième motivation apportée par le CEC : « Le Verbe s’est fait chair pour que nous connaissions l’amour de Dieu : «L`amour de Dieu a été manifesté envers nous en ce que Dieu a envoyé son Fils unique dans le monde, afin que nous vivions par lui.” (1 Jn 4,9). «Car Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en lui ne soit pas perdu, mais ait la vie éternelle (Jn 3,16) » (CEC 458).

L’incarnation de Dieu était impensable pour l’homme.

En dehors de la mythologie gréco-romaine, où les dieux ne sont pas Dieu mais des idoles, donc construites par l’imagination humaine, jamais, au grand jamais, l’homme n’aurait pu émettre l’hypothèse de l’incarnation de Dieu.

Les grands philosophes de l’Antiquité, comme Platon et Aristote, n’ont même pas envisagé cette possibilité.

Mais Dieu l’a fait par l’incarnation: il a voulu se révéler et se communiquer à l’homme pour que celui-ci devienne son ami et sa famille.

Saint Paul dit: « Mais Dieu, qui est riche en miséricorde, à cause du grand amour dont Il nous a aimés, alors que nous étions morts par suite de nos fautes, nous a fait revivre avec le Christ – c’est par grâce que vous êtes sauvés! -, avec lui Il nous a ressuscités et fait asseoir aux cieux, dans le Christ Jésus. Il a voulu par là démontrer dans les siècles à venir l’extraordinaire richesse de sa grâce, par sa bonté pour nous dans le Christ Jésus» (Ep 2, 4-7).

8. La troisième motivation présentée par le CEC : « Le Verbe s’est fait chair pour être notre modèle de sainteté : “Prenez sur vous mon joug, devenez mes disciples…” (Mt 11,29). « Moi, je suis le Chemin, la Vérité et la Vie ; personne ne va vers le Père sans passer par Moi » (Jn 14,6). 

Et le Père, sur la montagne de la Transfiguration, ordonne : « Écoutez-le » (Mc 9,7). En effet, le Christ est le modèle des Béatitudes et la norme de la Loi nouvelle : «Comme je vous ai aimés, aimez-vous, vous aussi, les uns les autres  » (Jn 15,12). Cet amour implique l’offrande effective de soi-même à sa suite» (CEC 459).

Cette motivation est celle que certains évoquent en premier : Dieu aurait pu s’incarner même si l’homme n’avait pas péché.

Ils disent : on ne peut pas lier la liberté de Dieu au péché de l’homme.

C’est tout à fait vrai.

Mais l’Écriture Sainte, comme nous l’avons vu, apporte une autre motivation principale, celle donnée dans le Credo (Pour nous les hommes, et pour notre salut, il descendit du ciel), par saint Thomas, saint Augustin et le CEC.

9. Enfin, en relation étroite avec le premier motif, le CEC dit : « Le Verbe s’est fait chair pour que nous devenions “participants de la nature divine” “ (2 P 1, 4) : C’est la raison pour laquelle le Verbe s’est fait homme et le Fils de Dieu, Fils de l’homme : afin que l’homme, en entrant en communion avec le Verbe et en recevant ainsi la filiation divine, devienne fils de Dieu » (saint Irénée de Lyon, Adversus haereses, 3, 19, 1). « Le Fils de Dieu s’est fait homme pour nous faire Dieu» (Saint Athanase d’Alexandrie, De Incarnatione, 54, 3). « Le Fils unique de Dieu, voulant que nous participions à sa divinité, a assumé notre nature, afin que, devenu homme, il fasse des hommes des dieux«  (Saint Thomas d’Aquin, Opusculum 57 in festo Corporis Christi, 1) » (CEC 460).

10. En conclusion, je voudrais citer ce que saint Thomas observe à nouveau : « Tous les autres motifs attribués à l’incarnation font partie des remèdes au péché.

En effet, les hommes, sans leur péché, auraient été éclairés par la lumière de la sagesse divine et perfectionnés par Dieu dans la justice de la sainteté, en vue de l’acquisition de toutes les connaissances nécessaires.

Mais puisque, abandonnant Dieu, ces derniers étaient descendus dans la matière, il convenait que Dieu, ayant assumé la chair, lui offre, par le biais de la matière également, le moyen de se sauver » (Summa Theologica, III, 1, ad 1).

11. En ce qui concerne la deuxième question : « Que veut dire cette idée que nous aussi, par nos actions quotidiennes, nos activités professionnelles, nos études, participons à l’activité de la Rédemption ?

Il est certain que la rédemption du Christ a été plus que suffisante et qu’elle a une valeur infinie à laquelle rien ne peut être ajouté.

Mais le Seigneur a voulu que nous, pécheurs et nécessiteux, une fois rachetés, devenions avec Lui des instruments de rédemption : non pas dans le sens d’ajouter quoi que ce soit, mais d’ouvrir des brèches en nous-mêmes et dans le cœur des autres pour que les trésors de la rédemption puissent s’y déverser.

Alors toutes nos actions, accomplies dans la grâce, c’est-à-dire dans le Christ, en vertu de la charité du Christ dont nous faisons part dans nos pensées et nos affections, profitent à la purification et à la sanctification de nous-mêmes et, en même temps, de beaucoup d’autres.

C’est en ce sens que saint Paul disait : « Je trouve ma joie dans les souffrances que j’endure pour vous, et je complète en ma chair ce qui manque aux épreuves du Christ pour son Corps, qui est l’Église» (Col 1, 24).

En souhaitant que toutes vos actions, y compris vos pensées, y conduisent, je vous assure de mon rappel dans le Seigneur et je vous bénis.

Père Angelo